« Les filles, je vous veux toutes dehors dans 4 minutes, on va nous attendre là-bas! » Nayana leva les yeux au ciel. Non, mais pour elle se prenait encore ? « T'es pas ma mère Cara.... » marmonna-t-elle dans ses dents. Cara était sa grande soeur et pourtant elle se comportait comme une mère. Une chose qui avait le don d'exaspérer fortement Nayana. La jeune femme n'avait nullement besoin qu'on la rappelle constamment à l'ordre et qu'on lui dise quoi faire. Elle n'avait pas vraiment envie d'aller à cette soirée organisée à l'occasion de Thanksgiving. Elle aurait largement préféré aller en boite ou passer la soirée avec Ezra. A la place, elle allait passer la soirée avec ses soeurs et les voisins du quartier. La joie. Déjà que Cara l'énervait à force de jouer les mamans, elle n'osait imaginer le reste de la soirée. Elle allait être surveillée comme si elle venait de sortir de prison par Cara, elle en mettait sa main au feu. Comme à l'habitude, Salomé ne put s'empêcher de lui lancer une remarque sur sa tenue. Trop court. Quant ce n'était pas pour lui reprocher de sortir sans arrêt et de filtrer en veux-tu en voilà, elle critiquait ses choix vestimentaires. Nayana se fichait pas mal de l'avis de sa jumelle. C'était peut-être trop court pour Salomé mais pas pour elle. Cette petite robe noire, elle l'aimait bien, elle n'allait pas changer pour autre chose. Cela mettrait en retard le petit groupe et Cara piquerait une crise. Au bout de quelques minutes, elle descendit rejoindre ses autres soeurs et elles partirent vers le lieu des festivités. Papa Maden ne venait pas, la grippe étant son amie depuis quelques jours. Nayana avançait à son rythme, légèrement en retrait par rapport à ses autres soeurs. Elle adressa un signe de tête aux voisins en guise de bonsoir. Au fur et à mesure que les Maden s'approchaient de la fête, la musique se faisait de plus en plus entendre. Nayana s'imagina déjà en train de danser sur une piste de danse. Au moins, elle ne devrait pas passer sa soirée à parler avec des gens. En chemin, Noeim les rejoignit. La jeune femme eut un sourire en coin en voyant la tête de Prudence. Leur petite marche s'arrêta au moment ou le groupe rencontra les Tripps. Sasha, Martha, Lana et les jumelles. Oui, encore des jumelles. Mais beaucoup plus petites que Nayana et Salomé. Cara, toute enjouée, fit les présentations. « Salut... » se contenta de dire Nayana. Que dire de plus franchement ? Tandis que les petites jumelles se mirent à parler, faisant rire une bonne partie du groupe, Nayana ne put s'empêcher d'ajouter son grain de sel à l'oreille de Cara : « Tu sais que tu joues parfaitement bien le rôle de belle-maman ?  » Sourire aux lèvres et ignorant le regard outré de sa grande soeur, Nayana reprit sa place d'origine tout en faisant semblant de s'intéresser à la conversation qui se déroulait. Belle-maman... Cara détestait la femme que Monsieur Maden avait rencontré. Nayana et ses autres soeurs ne l'apprécient guère plus. En observant du coin de loin Martha, Nayan se demanda si cette femme était bien acceptée par Lana.  Après tout, cette femme était aussi une belle-mère ...

Thanksgiving. Comment dire ? J’avais toujours détesté cette satanée fête. Dans un premier temps parce que cela n’avait aucun sens pour moi. J’avais peut-être célébré ce jour 3 ou 4 fois depuis ma naissance. Je n’avais jamais eu de famille à proprement parlé. Ma mère avait disparue de la circulation et Eliott n’étant pas un chef cuisinier très réputé, il lui arrivait parfois, quand l’envie se faisait sentir, de commander une dinde toute prête chez le boucher. On mangeait un morceau de blanc sur la petite table de salle à manger, devant la télé, et on regardait le journal de 20H00, pas de quoi sauter au plafond. J’entendais parfois mes camarades de classe babiller pendant des heures sur la belle dinde, sur les châtaignes, sur le bon gâteau qu’ils avaient pu avaler la veille. A mes yeux, ce n’était qu’une stupide fête commerciale en plus. Comme Noël. Comme la Saint Valentin. Depuis que je vivais chez Martha, j’avais dut m’habituer à la belle table, aux belles décorations et à toute la scène de famille parfaite qu’on servait toujours lors d’une telle occasion. Et encore une fois, j’avais l’impression que je n’étais pas à ma place. Parce que les filles étaient toutes excités et que moi j’étais simplement blasé de devoir me bouger de mon lit pour m’installer à table et faire semblant d’être heureuse de manger un bout de dinde rôti. Alors forcément, je n’avais pas vraiment sauté de joie quand Sasha et belle-maman m’avait annoncée qu’on sortait « en famille » pour l’occasion. J’avais simplement haussé les épaules. Est-ce que j’avais vraiment le droit de dire non de toute façon ? Encore une belle occasion pour Martha de se faire plaindre par tous les habitants de Pearl Trees. Elle n’avait même pas honte de se trimballer en ville au bras du frère de son mari avec un sourire de collégienne de 12 ans. Au début, j’avais décidée d’emmerder le monde en m’habillant n’importe comment. Et puis j’avais pensée à la réputation de Sasha et j’avais changé d’avis. Et même si ça ne me plaisait pas plus que ça, j’avais enfilée une robe noire, des talons haut et mes cheveux formaient un beau chignon. Le simple fait de me balader dans la rue et d’entendre les mamies du coin complimenter notre soi-disant famille me donna envie de rebrousser chemin. J’avais signé pour bouffer cette putain de dinde, pas pour jouer une pièce de théâtre débile. Mon humeur se dégrada considérablement lorsque je vis le sourire satisfait de Martha ET de Sasha. Et dire que j’allais devoir supporter ce merdier pendant des heures. Avec un soupir, je glissais mes mains gelées dans les poches de mon manteau. Courage Lana. Courage. Et c’est pile à ce moment-là que Tontonsha ‘ s’arrêta pour saluer nos voisines. Quelque visages familiers et c’est tout. Je ne savais même pas leurs prénoms. « Salut » murmurais-je d’une voix terne. Qu’est-ce que je pouvais bien dire de toute façon ? Je n’avais jamais été bonne comédienne et autant dire que le mot simuler ne faisait pas partie de mon vocabulaire. J’étais tranquillement en train de regarder mes chaussures lorsqu’un bout de la conversation me parvint. Le moment où une certaine Cara balança que Sasha lui avait parlait de Martha. Je relevais aussitôt la tête, interceptant le regard très bizarre que la brune lança à mon oncle. Le pompon fut le sourire de belle-maman et sa fameuse phrase. Oh mais oui tiens, qu’est-ce que Sasha a bien put dire sur toi ? Je levais les yeux au ciel en serrant les poings dans mon manteau. Je me mordis furieusement la langue pour ne pas laisser échapper ma rage. Je n’allais pas être capable de la supporter faire son cinéma toute une soirée. Cela faisait à peine 10 minutes et j’avais déjà envie de la frapper, de me barrer. Inconsciemment je tournais la tête vers Sasha et le fusillait du regard. Qu’est-ce qu’il avait pu lui raconter à Cara pour qu’elle lui lance un regard aussi subjectif ?!