Thanksgiving (topic commun)

THANKSGIVING A PEARL TREES

Il y a bientôt 400 ans, en 1620, les Pères Pèlerins arrivèrent du Mayflower et s’installèrent à Plymouth dans le Massachusetts. Les instants étaient difficiles pour les colons, touchés par la maladie qui ravagea la moitié des troupes. La tribu des Wampanoags leur offrit son aide, à travers des dons de nourriture et le partage de son savoir, elle leur apprit à pêcher, à chasser et à cultiver le maïs. En guise de remerciement, le gouverneur les invita autour d’un immense repas pour célébrer leur première récolte à l’automne suivant, et décréta trois jours d’action de grâce. Aujourd’hui, et chaque année, les Américains célèbrent Thanksgiving le quatrième jeudi de novembre, et profitent de cette fête pour se réunir en famille autour d’une cuisine odorante, mais également pour prier et remercier le Seigneur pour ce qu’il y a de bons dans leur vie.

Tous les habitants de Pearl Trees s’étaient réunis dans le parc à fleur, sous ce grand chapiteau que la ville avait installé pour l’occasion. Des lampes chauffantes avaient été disposées de tous les côtés afin qu’il y règne une atmosphère chaleureuse propice à la joie et à la bonne humeur. Tout le monde avait mis la main à la pâte et sur le buffet, on pouvait trouver toutes sortes de plats et d’entremets typiques : la soupe au potiron préparée par nos candidats à l’épreuve numéro cinq, mais également les célèbres œufs mimosas, des nombreuses dindes farcies aux marrons, aux huîtres, aux champignons ou encore aux pommes, accompagnées de leurs purées de patates douces ou leurs purées de pommes de terre, mais également des haricots verts et des pains de maïs. Sur la table des desserts, s’additionnaient des tartes au potiron, aux pommes, ou aux noix de pécans, entourées de bouteilles de jus de pomme à la cannelle et de bières.

Au milieu du chapiteau, les cinq tables des participants faisaient face à l’estrade sur laquelle avait été disposé le buffet. Autour d’eux, des bancs et de longues tables en bois serviraient aux habitants n’ayant pas souhaité tenter leur chance aux jeux organisés par le maire. Alors que tous avaient l’air ravis de retrouver leurs amis, famille et connaissances, ce dernier s’avança devant le micro sur la petite scène et prit la parole :

« Bonsoir à tous les habitants de Pearl Trees. Nous sommes réunis ce soir pour célébrer ensemble Thanksgiving dans des valeurs qui me sont chères, à moi et à toute la nation, celles du partage, de l’amour de son prochain et du respect. Merci à tous d’être venu fêter l’action de grâce avec ceux qui vous entourent au quotidien, que ce soit votre frère, votre père, votre amant ou votre boulanger, aujourd’hui, nous ne sommes plus des inconnus mais des gens qui partageons nos vie avec nos voisins. Sur ces belles paroles, je vous souhaite une excellente soirée, et un très bon repas. L’odeur de la farce me titille déjà les narines. Que Dieu vous bénisse et que la fête commence ! »

Thanksgiving, une si belle tradition que nous respections religieusement chaque année depuis vingt ans. Caitlin était très croyante, pour elle, cette fête signifiait bien plus que de manger de la dinde, elle y voyait quelque chose de plus spirituel et je respectais son opinion. Nous avions l’habitude de profiter de cette célébration pour nous retrouver en famille et remercier le Ciel pour le bonheur qu’il nous offrait. Seulement voilà, cette année, tout avait volé en éclat, mon avenir s’écrivait désormais en pointillé, mes proches me sentaient partir, non pas à cause de ce cancer dont ils ignoraient l’existence, mais par ces soirées où je ne rentrais pas, ces journées sans nouvelles, cette attitude détachée qui ruinait en éclats la cohésion des Andersen. Ma femme avait décidé de se prêter au jeu et de participer à la fête du village avec les enfants. Evidemment, j’étais rentré trop tard à la maison et tous étaient déjà en chemin. Aujourd’hui était un jour spécial, je ne pouvais pas déconner, j’avais besoin d’être avec eux, de voir des sourires sur leur visage. Demi-tour toute, je remontai dans ma voiture et pris la direction du parc à fleurs. De Pines Square, je n’avais pas long à faire, encore fallait-il trouver quelque part où se garer. Finalement, je trouvai une place à une centaine de mètres, arrêtai la voiture et me dirigeai vers cet immense chapiteau. Les allées du parc étaient déjà bondées, la ville entière avait l’air d’avoir répondu présente aux festivités. J’apercevais quelques têtes connues, serrais quelques mains et effectuais de nombreux hochements de tête en guise de bonjour alors que j’avançais à la recherche des miens. Je savais que Cara avait prévu de s’y rendre, elle avait bien tenté de me convaincre mais ma réponse avait été catégorique, il était hors de question que je mette un pied ici. Oui, et bien, comme tout ce qui faisait ma vie dernièrement, j’avais lamentablement rebroussé chemin et n’avait pas tenu sur ma parole. C’est là que sa beauté éblouit ma regard, elle s’était mise sur son 31 pour cette soirée spéciale, son sourire resplendissait dans toute la pièce, ma femme était assise à l’une des tables centrales, prête à se mêler à la lutte visiblement. J’étais particulièrement fière d’elle, finalement, j’avais bien fait de venir, je venais de réaliser une chose essentielle. Tout allait bien se passer, elle allait pouvoir reconstruire sa vie, elle le faisait déjà au milieu de ces inconnus. Ma femme avait choisi de venir ici avec ou sans moi, et c’était une bonne chose, ça prouvait qu’elle allait de l’avant. J’avais l’impression d’être ce fantôme tout à coup qui observait ses proches vivre leur vie sans lui, et s’en sortir. En se pointant ici, et contre toute attente, Timothy avait retrouvé espoir. Peut-être que tout ça n’allait pas être aussi difficile qu’il l’avait cru.

Thanksgiving

Les sourires, les regards complices, les doigts entrelacés. Le chapiteau semblait hurler à la félicité, au petit bonheur. Travis avait passé sa veste noire, celle qui ne lui tenait plus assez chaud vu qu’il commençait à faire un peu froid dans le coin mais qu’il appréciait trop pour abandonner. Se balader dans Pearl Trees était pénible, il risquait toujours de croiser quelqu’un qu’il n’avait pas envie de voir. Pas bien compliqué ! Vu que Travis n’avait absolument aucune envie de voir le trois quart de la ville. Pour une raison inconnue, cependant, il avait décidé d’aller faire un tour au parc fleuris. Là où tout Pearl Trees s’était donné rendez-vous pour fêter Thanksgiving.

Quelques regards se posèrent sur lui mais personne ne vint à sa rencontre, quelques-uns lui adressèrent des signes de la main auxquels il ne répondit pas, bien évidemment. Travis, les deux mains enfoncées dans les poches, avança jusqu’à une table où quelques verres vides étaient mis à la disposition des villageois. Le jeune homme se servit un verre – à base de potiron, rien de bien folichon – et s’adossa à l’un des murs. Il y avait beaucoup de gens, on aurait presque pu croire, à les regarder comme ça, que Pearl Trees n’était pas si minuscule ! Or, elle l’était, soyons francs. Travis haussa les épaules comme pour répondre à ses propres questions intérieurement.

- Ah merde ... désolé !

Un coup d’épaule et le bras de Travis avait flanché, le liquide de son verre s’épanchant sur les vêtements de la personne en face de lui. C’était naze ! Lui qui détestait qu’on le dérange, venait d’infliger ce genre de désagréments à une autre personne. Pour une fois, il était sincère quand il s’était excusé.

- Joyeux Thanksgiving.

Après tout, ils étaient tous là pour ça, non ?